
Le 17 mars 2020 se produit un évènement historique : après l’Italie et l’Espagne, et avant la Belgique, l’Allemagne et le Royaume uni, pour ne citer que quelques pays voisins, la France est confinée pour entraver la propagation d’un virus qui provoque la saturation des hôpitaux.
Les contraintes imposées dans notre pays sont les plus strictes d’Europe : promenades limitées à une heure, dans un rayon de 1 km du domicile, attestation de déplacement obligatoire, contrôles policiers très fréquents avec verbalisation quasi systématique en cas de non-respect des consignes.
Ces contraintes interdisent à la très grande majorité des Français de pratiquer des activités de sport et de détente en plein air, telle que l’équitation, le vélo de route, le VTT, la randonnée, ou encore la pêche à la ligne. Les parcs et autres espaces verts sont fermés. Même l’accès aux cimetières est interdit !
Or, il faut rappeler que la seule et unique mesure efficace pour limiter la propagation du virus était la distanciation physique. Nous nous sommes donc retrouvés sous le joug d’une véritable punition motivée par la suspicion généralisée. Ce choix politique a privé inutilement les citoyens de ressources essentielles à leur équilibre physique et psychologique, transformant l’espace public en un lieu interdit, et plaçant l’ensemble de la population en situation d’infantilisation collective.
J’ai le sentiment d’avoir participé à une expérience de Milgram à grande échelle qui a permis aux autorités de voir jusqu’à quel niveau il était possible de restreindre les libertés les plus élémentaires sans rencontrer de résistance majeure. En réagissant très favorablement, n’avons-nous pas ouvert la voie à d’autres restrictions arbitraires, au prétexte de crises réelles ou supposées ?
Je ne détaille pas les mesures des confinements qui ont suivi, avec leur lot d’absurdités, telles que l’obligation de porter un masque en extérieur, dans des rues très peu fréquentées, l’interdiction de rester immobiles dans les parcs et jardins, etc. Au printemps 2021, j’ai pris une carte de pêche uniquement pour pouvoir me rendre à la campagne à plus de 10 kilomètres de mon domicile…
Indépendamment des contraintes humiliantes, arbitraires et contre-productives, les confinements ont eu effet positif assez inattendu : beaucoup de personnes se sont rendues compte qu’elles avaient passé une grande partie de leur vie confinée dans des salles de classes ou des bureaux, parfois prisonnières de trajets quotidiens interminables, et ont eu envie d’étudier et de travailler différemment. Elles ont commencé à remettre en question un modèle de société qui privilégie le présentéisme à l’équilibre personnel et les horaires imposés aux libertés individuelles.
Ce fût mon cas. De retour à l’université, j’ai réalisé que le vrai confinement, je l’avais vécu durant mon parcours scolaire, et plus tard, lors des séances d’enseignement traditionnel en présence. Cela m’a poussé à accélérer mes innovations pédagogiques vers un enseignement hybride, flexible, donnant plus de liberté aux élèves, sans concession sur les objectifs d’apprentissage, ce dont mes étudiantes et étudiants ne manquent pas de me remercier régulièrement.
NB : Cette année n’est pas sans printemps, et les photos de l’acte 1 arriveront prochainement 🙂.
Triste anniversaire en effet. Moi, j’ai découvert combien je détestais enseigner en ligne 🙂
Oui. En ce qui me concerne, sur cet aspect, ce fut le contraire. Je suis plus détendu et enthousiaste lorsque j’enseigne en ligne. Au début de ma carrière, je suis allé vivre 5 ans à Lens, dans le nord de la France, au pays des terrils et des corons. C’était le prix à payer pour exercer mon métier. Ces 5 années ont été très difficiles. C’était l’exemple typique d’un lieu de vie non souhaité, et même détesté, mais accepté pour des raisons professionnelles. Le télétravail intégral permet de vivre où on veut et pour moi c’est vraiment un énorme avantage.
Oui, je partage très largement le constat. J’ajouterai deux choses :
– au tout début et bien que biologiste de formation, j’ai en partie succombé au début à une forme de panique sanitaire me faisant tout nettoyer à l’excès ;
– en tant que responsable d’une structure d’une cinquantaine de salariés, j’ai été assez malmené par les directives gouvernementales avec les laisser-passer à faire pour les personnes qui devaient venir au travail (et on a dû s’y reprendre à plusieurs reprises car les directives changeaient parfois d’un jour à l’autre), pour organiser le télétravail alors que rien n’était organisé au début en termes de serveur et VPN, pour organiser le chômage partiel (rare heureusement), pour organiser les missions de terrain des agents, décliner une forme de règlement sanitaire propre à l’entreprise (une vingtaine de mise à jour jusqu’au printemps 2022). Personnellement, pour tout le charge mentale suscitée, l’absence de perspective claire et le côté amateur du gouvernement, j’ai très mal vécu psychologiquement le premier confinement. Les suivants, cela s’est mieux passé car j’avais une meilleure idée de là où on allait.
Ah oui, je lavais tous les emballages de ce que je ramenais du supermarché (drive) : les pots de yaourt, boites de conserve, etc. Je savonnais même les fruits avant de les rincer. En promenade, je m’écartais dans les buissons pour être à moins trois mètres des promeneurs que je croisais. Un jour, j’ai discuté avec une personne âgée, à sa fenêtre, en restant à 10 mètres d’elle, et ensuite je me suis senti coupable. Les règles drastiques imposées nous ont conduit à surestimer les risques de transmission du virus.